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EUR CHF: en route vers la parité?
Rapide récap de la semaine passée:
Semaine blanche sur les marchés des changes, marquée par des congés sur les principales places financières mondiales: l’euro finit inchangé à 1.07 contre le Dollar et 0.85 contre le Sterling.
Seul le Yen a connu une certaine volatilité revenant sur des niveaux de 130 contre le Dollar, à la faveur de nouvelles tensions sur les taux longs américains.
Nous notons à ce propos les chiffres très dynamiques de l’emploi aux États Unis publiés vendredi (plus de 400,000 créations d’emploi et un taux de chômage à 3.6%). Ceux-ci ne montrent pas le moindre signe d’effritement et donnent à penser que la Fed va avoir fort à faire pour tâcher de freiner l’économie et de faire baisser l’inflation.
C’est positif pour le Dollar à court terme.
Aujourd’hui, nous allons vous parler du Franc Suisse qui s’apprête à atteindre la parité avec l’Euro.
L’euro suisse cote aujourd’hui 1.03. Nous attendons un passage à la parité dans les 6prochains mois, avec un objectif à 12 mois de 0.95. Il est possible que nousarrivions à ces objectifs beaucoup plus rapidement, cela dépendra du rythme choisi par la BNS.
Pourquoi une telle anticipation?
En un mot, pour lutter contre l’inflation. La Banque Nationale Suisse reste la dernière banque centrale crédible en Europe et elle ne va vouloir à aucun prix subir les mésaventures de la BCE qui aura laisséfiler l’inflation en Europe jusqu’à 8%et peut-être plus encore dans les mois qui viennent.
Que peut-on essayer de deviner du plan de bataille de Thomas Jordan, le patron de la BNS pour tenir un niveau d’inflation acceptable(2.9% en Mai)?
Tout d’abord, la BNS va remonter ses taux de 0.25% à 2reprises d’ici la fin de l’année, en ligne avec les annonces de la BCE.
La fin prochaine des taux négatifs en Suisse ne manquera sans doute pas de déclencher de nouveaux flux financiers d’investisseurs désireux de placer leur argent en Franc suisse, tout particulièrement en ces temps troublés. Phénomène qui entraînerait une appréciation de la monnaie suisse, s’il n’était pas éliminé ou tout au moins freiné par la BNS qui achète de l’Euro.
Et c’est là que réside ce qui va faire la nouveauté de la stratégie suisse: la BNS va permettre une appréciation nominale de sa devise pour lutter plus efficacement contre l’inflation importée. C’est à dire qu’au lieu de défendre un niveau de 1.02 par exemple, la BNS va tout d’abord consentir une appréciation du Franc qui maintiendra des niveaux de prix comparables entre l’Union et la Confédération. C’est déjà important quand l’écart d’inflation est de 5% environ.
Mais pour freiner encore plus la hausse des prix, la BNS va probablement laisser le Franc s’apprécier encore un peu plus, faisant mécaniquement légèrement baisser les prix des produits importés, une fois ceux-ci exprimés en Francs suisses.
Une telle stratégie réduit la compétitivité prix des produits suisses et la croissance mais avec excédent commercial de 7% du PIB et une croissance à 3%, la BNS a de la marge.
Pour ce qui est du rythme d’appréciation, c’est largement la BNS qui a la main, avec tout de même 2 facteurs à prendre en compte:
- en cas de résolution du conflit ukrainien, l’Euro serait très soutenu et cela retarderait un peu le mouvement.
- la BNS ne va pas vouloir encourager la spéculation avec des mouvements trop brusques et donc des gains rapides pour les opérateurs déjà positionnés.
Un dernier point pour être complet, les réserves de changes de la BNS. En freinant l’appréciation du Franc Suisse, la BNS a accumulé des réserves de change d’environ 1000 milliards de Francs suisses, soit 140% du PIB de la Confédération. C’est considérable et cela constitue un véritable fonds souverain tout à fait comparable à ceux existant en Asie ou Moyen-Orient.
Une partie des réserves étant investies en actions et en particulier en actions de valeurs tech, le fonds a vraisemblablement subi des pertes substantielles récemment.
Cela n’a aucune espèce d’importance pour le devenir du Franc suisse puisque la BNS ne s’apprête pas à rapatrier une quelconque portion de ses investissements internationaux en Francs suisses. Au contraire, c’est plutôt à un tsunami d’Euros et de Dollars auquel la BNS va devoir faire face et la hausse induite des réserves fera sans doute plus que couvrir les pertes subies.
Bonne semaine à tous